Dimanche du Baptême du Seigneur 2020 A
Les premiers chrétiens ont eu du mal à interpréter le sens du baptême de Jésus: si Jésus de Nazareth est Dieu ou fils de Dieu, a-t-il besoin de se faire baptiser? Serait-il donc pécheur comme les autres? Mais alors un pécheur peut-il sauver d’autres pécheurs? Pourtant cet événement est authentique, Jésus fut baptisé par Jean Baptiste. En descendant dans le Jourdain, il s’est encore abaissé pour nous révéler sa grandeur.
Le premier à être surpris, c’est Jean le Baptiste: «C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi?» (Mt3,14) Jean a annoncé celui qui était plus fort que lui, celui qui baptise dans l’Esprit Saint et qui juge le monde; et voilà que les rôles sont inversés. Jésus ne vient pas pour baptiser Jean mais pour être baptisé par lui. Jean dont la mission, le but de sa vie est de préparer la venue du Messie ne comprend pas ce dernier. Il doit laisser faire Jésus et abandonner ses schémas mentaux: le Messie n’est pas tout à fait celui qu’il attend. Personne ne peut pas prétendre connaître Jésus, le fils de Dieu, sinon son Père. Les pensées et les voies de Dieu sont insondables.
L’élément central dans les lectures de cette célébration, c’est l’Esprit Saint, c’est lui qui nous révèle le secret du baptême de Jésus. Nous avons entendu le prophète Isaïe: son message a été écrit pour des exilés. Après quarante ans d’exil, certains n’étaient pas très décidés à rentrer en Palestine, la terre promise. Mais c’est là où l’alliance entre Dieu et son peuple se réalisera par un serviteur qui a toute la puissance divine «Voici mon serviteur que je soutiens, mon élu qui a toute ma faveur. J’ai fait reposer sur lui mon esprit.» (Is42, 1) Rempli de l’Esprit, ce serviteur fera comme Dieu en personne qui ouvre les yeux des aveugles, fait sortir les captifs de leur prison, et, de leur cachot, ceux qui habitent les ténèbres. (cf Is42, 7) Le baptême du Christ montre que c’est bien lui qui est décrit comme serviteur de Dieu. «Laisse faire pour le moment, car convient-il que nous accomplissions toute justice,» (Mt3, 15) dit Jésus à Jean Baptiste. «Dès qu’il fut baptisé (…) voici que les cieux s’ouvrirent: il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et des cieux une voix disait: Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie.» (Mt 3, 16-17) Un Messie vient de paraître.
Mais pourquoi Jésus, se fait-il baptiser? Quel est le sens de son baptême? Une simple manifestation? Son baptême annonce sa descente, il descend plus bas que le jour de sa naissance. Il est descendu si bas que nul peut descendre plus bas et c’est pourquoi en remontant vers le Père au jour de la Résurrection, il emporte avec lui toutes nos détresses et souffrances humaines. Les Pères de l’Église ont vu dans la descente de Jésus dans l’eau du Jourdain le symbole de sa plongée dans la mort. Le Christ est descendu jusqu’au fond de notre humanité, dans notre péché, pour nous en sauver. Il l’a fait gratuitement, sans nécessité de sa part. Le baptême de Jésus est l’anticipation de sa pâque et de notre salut. Voilà ce qui était difficile à comprendre pour Jean «Dieu sauve en s’abaissant.»
Le baptême de Jésus n’a rien de pénitence, ni de conversion. Il n’avait pas de péché à se faire pardonner. Le mot «baptême» signifie «plonger.» Au jour de son baptême, Jésus, pur de tout péché, a été plongé dans l’eau du Jourdain. Il en est ressorti porteur de tout le péché du monde. Il l’a pris sur lui pour nous en libérer. Quant à nous, au jour de notre baptême, nous avons été immergés dans l’amour qui est en Dieu, Père, Fils et Saint Esprit. Ce jour-là, Dieu nous a dit: «Tu es mon enfant bien-aimé.» Il a pris sur lui tous nos péchés et toute notre misère. Avec nous, il porte sa croix et nous la portons avec lui. Notre vie peut être marquée par bien des faiblesses, des histoires tourmentées ou malheureuses. Mais le Seigneur est là. Il nous rejoint.
En recevant ce baptême, le Christ a manifesté sa complète solidarité avec le Père et sa généreuse docilité envers les pécheurs. Il nous rappelle que l’amour de Dieu et l’amour du prochain sont inséparables. On ne peut pas vivre en enfant de Dieu sans vivre ensemble comme des frères, solidaires les uns des autres. Le Christ nous donne le témoignage d’un amour passionné pour Dieu et pour l’humanité. Et c’est sur ce chemin qu’il veut nous conduire. Nous savons bien que ce n’est pas gagné. Dans notre vie, il peut y avoir des inclinations mauvaises qui nous éloignent de l’amour. Pensons à l’orgueil, l’égoïsme, la malhonnêteté. Mais le Seigneur est toujours là. Il ne se lasse jamais de nous offrir son pardon. Là où le péché a abondé, son amour a surabondé.
En Jésus, Dieu est avec tous les hommes de toutes les nations. Saint Pierre l’a compris après la résurrection de Jésus, en annonçant la Bonne Nouvelle au centurion de l’armée romaine, donc un païen. «En vérité, je le comprends, Dieu est impartial: il accueille, quelle que soit la nation, celui qui le craint et dont les œuvres sont justes.» (Ac10, 34-35) L’Esprit de Dieu n’est plus réservé aux quelques hommes élus, il descend sur chacun de nous le jour de notre baptême. Il nous donne la mission d'apporter la paix, la bonté, la compassion, l'amour dans notre monde.