Soixante-septième méditation: mercredi 20 mai 2020 — 16. Paroisse Saint-Germain d'Auxerre

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Soixante-septième méditation: mercredi 20 mai 2020

À partir de la première lecture de la messe du jour : Actes des Apôtres 17, 15.22 - 18, 1

Photo: colline de l’Aréopage d’Athènes.

Texte de référence

Paul se trouve maintenant à Athènes, au centre du monde culturel de l’Antiquité. Rome a depuis longtemps supplanté le prestige des Cités grecques, mais Athènes, la Cité de Périclès et d’Aristote conserve la mémoire des racines de la civilisation et de la pensée dans le monde méditerranéen. Paul s’est rendu à l’Aréopage, cette célèbre colline dominant l’Agora d’Athènes est le lieu sur lequel se réunit une sorte de conseil suprême de la Cité. C’est devant les membres de cette Autorité judiciaire et morale d’Athènes que Paul prend la parole. Très habilement, il leur adresse un discours extrêmement bien proportionné à leurs intelligences fines, et rejoignant les fibres de la pensée grecques. On pourrait reprendre chacun des points par lesquels il entre en contact avec les Athéniens; ces connexions nous aideraient à comprendre à quel point Paul admire la grandeur de leur culture et connait leur pensée. Dans son discours, il s’adresse très clairement à cette élite dont l’élévation culturelle et intellectuelle dépasse les cadres d’un paganisme un peu rustre. Ainsi, quand il leur dit : « Le Dieu qui a fait le monde et tout ce qu’il contient, lui qui est Seigneur du ciel et de la terre, n’habite pas des sanctuaires faits de main d’homme ; il n’est pas non plus servi par des mains humaines, comme s’il avait besoin de quoi que ce soit, lui qui donne à tous la vie, le souffle et tout le nécessaire », il n’est sans doute pas offensant vis-à-vis de ces hommes. En effet, nous oublions bien souvent que dans le monde païen, et dans le monde grec en particulier, il existait de très nombreux courants cherchant à s’élever vers le divin, au-delà des limites des cultes officiels formels. Il y a fort à parier que ces hommes l’écoutèrent bien attentivement quand il leur parla des origines de l’homme, de ce Dieu en qui «  nous avons la vie, le mouvement et l’être »; Epiménide et Aratos de Soles ne sont pas loin; les mots de la pensée grecque affleurent juste sous la surface de son annonce de la Bonne Nouvelle. La pierre d’achoppement qui empêchera l’annonce paulienne d’aller plus loin ne viendra pas d’une remise en question de la culture ou de la morale des Athéniens, mais de la proximité de Dieu et de l’étendue du Salut qu’Il est venu apporter : quand, à la fin de son discours il leur dit que Dieu « a fixé le jour où il va juger la terre avec justice, par un homme qu’il a établi pour cela, quand il l’a accrédité auprès de tous en le ressuscitant d’entre les morts », Paul leur annonce à la fois l’Incarnation et la Résurrection. Autant il avait réussi à rejoindre ces hommes par les voies subtiles de l’esprit, autant le rapprochement butta sur la chair. Que Dieu les rejoigne comme un homme, et que Celui-ci ressuscite d’entre les morts, était inacceptable pour ces grecs habitués à la dévalorisation de la chair. En regardant bien c’est d’ailleurs toujours la pierre d’achoppement: la proximité de Dieu qui se fait chair et qui promet la chair aux noces de l’éternité, reste en grande partie incompréhensible à nos intelligences spiritualistes. Même comme Chrétiens nous oublions souvent que le Verbe s’est fait chair et que la chair est donc le lieu de la plus grande révélation divine… Nous continuons de chercher Dieu ailleurs, dans un espace plus « digne » alors qu’Il nous attend dans notre condition basse et terreuse… grand Mystère! Soyons comme saint Paul, assez fins pour rejoindre les hommes dans leur culture et leurs recherches, mais ne bradons pas l’essentiel du message de la Bonne Nouvelle qui est contenu dans les mystères de l’Incarnation et de la Résurrection. «  En effet, la création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu » (Rm 8, 19).