Dans notre prière — Diocèse de Sens & Auxerre

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Dans notre prière

Abbé Maurice Gruau

Monsieur l'Abbé Maurice Gruau est décédé le mardi 11 janvier 2022, à l'âge de 91 ans, dans la 67e année de son ministère presbytéral.

  • Professeur au Lycée du Sacré-Cœur de Mayenne, 1955-1956
  • Vicaire à Saint-Martin-de-Connée, 1956-1958
  • Vicaire au Bourgneuf-la-Forêt, 1958-1962
  • Vicaire à Ernée, 1962-1963
  • Curé d’Ernée et doyen du secteur Notre-Dame de Charné, 1963-1967
  • Délégué épiscopal pour l’Apostolat des Laïcs, responsable de la Maison des Œuvres à Laval, 1967-1971
  • Vicaire général du diocèse de Laval, 1971-1979
  • Curé de l’ensemble paroissial d’Appoigny, 1979-2002
  • Aumônier du Centre de détention de Joux-la-Ville, 2002-2003.


La cérémonie de ses funérailles a été célébrée le mercredi 26 janvier 2022 14h30, en la collégiale
Saint-Pierre Saint-Paul d’Appoigny, suivie de l’inhumation au cimetière de Cheny.

Hommages

Maurice nous a quittés le 11 janvier. Ordonné prêtre à Laval en 1955, il fut le curé d’Appoigny, en Bourgogne, jusqu’en 2001. Il enseigne la linguistique à l’université de Rennes et l’anthropologie religieuse à l’université de Paris VII. Il est l’auteur de Naissance d’un vieux prêtre, Ed. Métailié, 2012 et de L’homme rituel, anthropologie du rituel catholique français, Ed. Métailié, 1999. Fidèle de notre communauté, journaliste, professeur de fac, vicaire général, aumônier des prisons, il fut un prêtre à l’écoute du monde. Sa parole fut libre et ses décisions souvent prophétiques. (Paroisse Saint-Merry à Paris).

Par le père Gilbert Chauvin, en l'église d'Appoigny

Inlassablement depuis 2000 ans retentit dans l’Évangile cette parole du Christ : « Je suis venu non pour être servi mais pour servir. » C’est ce qu’a vécu au milieu de nous Maurice.

Le prêtre est serviteur au service d’une communauté. Il n’est pas là pour exercer un pouvoir, l’autorité mais pour se mettre au service de tous. Méfions-nous, n’enfermons pas le prêtre dans le sacré. Nous en faisons un intouchable. Ces dernières années nous ont montré où cela nous a menés : une Église éclaboussée, meurtrie, honteuse.

Maurice, comme tout prêtre fidèle à l’Evangile, a été à l’écoute du monde. Sa parole fut libre et ses décisions souvent prophétiques. Son cri fut celui de Dieu pour son peuple durant son esclavage en Égypte : « J’ai vu la misère de mon peuple. J’irai le libérer. »

Né la même année, je suis de la génération de Maurice. Ce qu’il a exprimé, avec délicatesse, lors de la parution de son livre, Naissance d’un vieux prêtre : « Nos années sont de la même encre même si elles ont été écrites en d’autres lieux. Dieu nous a comblés en nous faisant vivre une époque merveilleuse. »

Nous sommes nés avec l’Action catholique, fenêtre grande ouverte sur le monde. L’Église était présente dans tous les secteurs de la vie. En tête par son nombre, l’Action catholique générale des femmes, l’ACGF ; l’ACGH ; le monde indépendant, ACI ; le monde ouvrier, ACO ; le monde rural, JAC ; le monde étudiant, JEC. Tout ce monde de militants alertés par le livre, France – pays de mission, et les enquêtes sociologiques du Père Boulard, se mobilisent pour mettre un frein à la déchristianisation.

Toute une effervescence missionnaire apparaît : prêtres ouvriers, Mission de France, Mission de Paris, Équipes Madeleine Delbrêl dans la banlieue rouge. La presse s’engage : bulletins paroissiaux, La Vie catholique illustrée, Témoignage chrétien. Même le syndicat chrétien devient CFDT pour être plus proche du monde du travail. Jusqu’au bon pape Jean XXIII qui nous recommande de collaborer dans des actions concrètes sur le terrain avec ceux qui ne partagent pas notre foi.

Nous, les prêtres, nous avons abandonné tout signe distinctif qui nous mettait à part. Être comme tout le monde. L’un parmi les autres. Selon le paradoxe de l’Évangile : « Disparaître pour être efficace ». « Vous êtes le sel de la terre – nous dit le Christ – le sel n’est utile qu’en disparaissant. » Et nous savons bien que ni la soutane ni le col romain ne sauveront le monde. Certes, nous avons eu des audaces hasardeuses, fait des erreurs mais tout un courant d’enthousiasme soulevait le peuple chrétien. Nous vivions une véritable révolution. Le concile pouvait s’ouvrir.

Quelques semaines avant sa mort, j’ai pu voir Maurice à la Maison Marie-Thérèse, boulevard Raspail. Il était alité dans sa chambre magnifiquement décorée par Nourdine. Nous avons évoqué ce qui nous a fait vivre.

Avant ses ennuis de santé, nous avions l’habitude de nous retrouver à l’église Saint-Merry, ce Centre pastoral voulu par le Père Marty en 1975, un lieu d’expérimentations pour témoigner de l’Évangile et inventer des modes nouveaux pour l’Église de demain. Ce lieu fut l’abreuvoir qui a étanché la soif de nombreux chrétiens en recherche, lieu d’élection de Maurice. Tout ce qu’il avait jadis mis en place dans les communautés où il était passé, il le voyait vivre à Saint-Merry. La célébration eucharistique préparée par prêtres et laïcs montrait que c’est tout le peuple qui est sacerdotal, comme le dit Hervé Legrand. Maurice trouvait là une Eglise qui allait aux périphéries, vers ceux qui s’étaient éloignés pour des raisons matrimoniales, d’orientation sexuelle… Lieu d’accueil inconditionnel, de convivialité, de solidarité. C’est là, entre autres, que Coluche a démarré les Restos du Cœur, que de nombreux artistes ont montré que leurs œuvres pouvaient être un chemin vers Dieu. Une Église qui prend des voies nouvelles ne pouvait que plaire à Maurice, lui qui avait toujours cherché à ce que l’Église soit pénétrée par la vie du siècle.

Nous sommes fin janvier. Le printemps s’annonce. C’est le temps de la taille. Saurons-nous faire l’émondage nécessaire… ce que réclame sans cesse le Pape François : des réformes… pour que les bourgeons déjà là puissent éclater, grandir pour donner les rameaux de l’Église de demain. Avec tous les anciens paroissiens de la Mayenne, de Chevannes, d’Appoigny, tous ses vieux compagnons de route, de tout cœur, nous lui disons : 

Merci Maurice pour ce que tu as semé. Dieu saura le récolter, lui qui ne met jamais hors les murs.

Par la communauté de Chevannes

Maurice, en 1983, venant du diocèse de Laval, tu étais nommé par notre évêque, le Père Eugène Ernoult, curé de notre secteur paroissial de Chevannes.

Tu étais un visionnaire et un prophète…

Tu avais compris bien avant d’autres, que l’avenir de l’Église dépendrait de la participation et de l’engagement des laïcs, car le nombre des prêtres allait très rapidement diminuer considérablement.

Tu as pris ton bâton de pèlerin… Tu es allé voir chacun, chacune, proposant à certains d’aller rencontrer les familles dès l’annonce d’un décès, à d’autres de prendre en charge la préparation des baptêmes, à tous de prendre une part active dans la préparation des messes et liturgies, sans jamais remettre en cause ce que chaque équipe avait prévu. Tu nous as fait comprendre que l’avenir de nos communautés et de l’Eglise était à ce prix.

Tu incarnais l’Évangile permettant à chacun de se mettre en marche et de se révéler. Tu nous as encouragés et tu nous as formés pour prendre en charge la célébration des obsèques, allant jusqu’à donner, en accord avec le Père Ernoult, la mission de célébrer les baptêmes, à ceux et celles qui en avaient assuré la préparation.

Tu nous incitais à toujours privilégier l’accueil : accueil de l’autre quel qu’il soit, là où il en était, sans jugement ; accueil de toute demande, de baptême notamment, car tu nous disais qu’il ne fallait jamais fermer une porte.

Bien loin de te cantonner au seul fonctionnement de l’Église, tu étais, dans l’esprit du Christ et de l’Évangile, un passionné d’humanité et tu te voulais au service de tous.

Tu nous as ouverts à l’intelligence des Écritures par ton témoignage mais aussi par les conférences que tu nous proposais, sur les Évangiles de Pâques, la Résurrection et d’autres encore...

Nous avons le souvenir de tes homélies si riches et de leurs dernières phrases percutantes.

Tu étais un chercheur de Dieu, le Tout-Autre, l’Au-delà de Tout, et tu nous avais dit un jour : « personne n’a le droit de s’asseoir à la place de Dieu, pas même l’Église » !

Il y avait dans ta vie, dans tes espoirs, dans tes projets, dans tes désirs, ce petit grain de folie évangélique qui ressemble à Jésus.

Non pas un grain d'excentricité, non pas des outrances de langage ou de comportement qui dénaturent plutôt le témoignage, mais une folie de confiance, et de service.

Il a été fou pour toi de ne pas chercher le repos, de te vouloir sans cesse en route, en exode, en exil, de te hâter, comme un voyageur, car il y avait urgence pour le monde et pour l'Église.

Tu nous as surpris, déroutés, secoués, mais grâce à toi notre communauté est née, notre communauté qui est toujours vivante et active, essayant de témoigner de la foi qui fait vivre, la foi qui t’a animé durant toute ta vie.

Aujourd’hui encore, tu restes pour nous le référent inoubliable.

Mot d’adieu de la communauté d’Appoigny-Chichery

Maurice.

Un sourire accueillant, un regard bienveillant, une grande simplicité… c’était Maurice.

Il était comme un frère pour beaucoup, abordable par tous, à l’écoute de chacun sans jugement toujours dans la bienveillance, il apportait son soutien dans les périodes difficiles. Maurice était un puits de science et de sagesse.

Il était aussi un homme en avance sur son temps, le concile Vatican 2 lui a parlé très rapidement et pour lui les laïcs avaient une place à prendre au sein de l’Église. Très tôt, il nous a envoyé en mission (équipe d’obsèques, préparation au mariage, au baptême…). Il a travaillé pour que nous soyons une communauté ouverte, accueillante au service de tous et particulièrement ceux qui sont loin de l’Église, une communauté qui se prend en charge.

Maurice avait beaucoup de considération pour les femmes il était à leurs écoute et leurs à donner une vrai place au sein de ses paroisses.

Comme le dit le pape François : « allez aux périphéries ». Maurice l’avait compris depuis très longtemps et était dans cette démarche il disait «  j’ai plus à faire pour les gens dans les cafés que pour ceux qui sont dans l’Église du Seigneur ».

Maurice nous a sans doute permis de comprendre ce qu’est la Foi, ce qu’est vivre l’Évangile chaque jour avec en priorité l’Amour du prochain.

Enfin, Maurice a été une lumière sur la route de ceux et celles qui ont eu la chance de le rencontrer, lumière qui éclaire encore notre chemin aujourd’hui.

 Pour tout cela : Merci Maurice.

 

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