Qu’est-ce qui est essentiel ? — Diocèse de Sens & Auxerre

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Qu’est-ce qui est essentiel ?

Édytorial de la revue diocésaine de juin 2021, par le père Joël Rignault, vicaire général

Répondre à cette question est souvent plus difficile que l’on pourrait le penser spontanément.

Ce que nous venons tous de traverser à cause de cette pandémie et donc de ses conséquences en termes de confinement, de couvre-feu, mais aussi de drames qui ont conduit des personnes à mourir de cette maladie contagieuse, nous a mis en demeure de revisiter de gré ou de force cette question : mais qu’est-ce qui est essentiel ?

Peut-être est-ce vital d’écouter ce que nous dit l’Évangile de Marc au chapitre 12 : “Jésus s’était assis dans le temple en face de la porte du trésor, et regardait comment la foule y mettait de l’argent. Beaucoup de riches y mettaient de grosses sommes. Une pauvre veuve s’avança et mit deux petites pièces de monnaie. Jésus appela ses disciples et leur déclara : “Amen, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis dans le trésor plus que tous les autres. Car tous, ils ont pris sur leur superflu, mais elle, a pris sur son indigence : elle a mis tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre”” Marc 12, 41-44

Est-ce à dire que l’essentiel est du côté de ce qui est vital ? Dans ce récit, la veuve engage dans son don, toute sa vie ; elle se met en danger.

Au vu de ce que nous venons de traverser et des dangers que nous pouvions rencontrer à cause de cette maladie, la question rebondit : mais qu’est-ce qui est vital ?

Les mesures nécessairement prises dans les structures accueillant des personnes vulnérables de par l’âge ou la fragilité de la santé ont effectivement reposé d’une façon abrupte et parfois cruelle : mais qu’est-ce qui est essentiel ?

D’une façon plus légère, mais qui n’est pas sans conséquences économiques et aussi humaines, ne sont restés ouverts, durant de longues périodes, que les commerces essentiels. Avec quels critères le gouvernement devait statuer pour déterminer ce qui est essentiel ? Évidemment, mon propos n’est pas ici d’évaluer ces critères, mais de constater que nous n’avions plus accès facilement à un certain nombre d’articles, pas plus qu’à un certain nombre d’activités (cultuelles, culturelles, sportives, etc…). Cela nous a donc tous conduits à reconsidérer ce qui est finalement essentiel.

Cependant, nous avons souhaité, dans ce numéro, nous attarder sur ce questionnement, parce que nous venons tous d’expérimenter que parfois le “superflu” ou considéré comme tel, peut nous permettre de tenir solidement lorsque nous traversons un moment difficile et que ce que nous considérons comme “essentiel” n’est finalement pas à mettre au premier plan.

La pression publicitaire et commerciale crée des besoins que nous assouvissons souvent de façon compulsive par des achats qui s’avèrent ensuite inutiles. Cette logique notamment dénoncée par notre pape François, de façon prophétique, dans son encyclique Laudato si’, crée comme un emprisonnement.

On ne peut pas ne pas être consommateur, mais comment être un consommateur raisonné et libre ?
Il en va sans doute d’un nouvel ordre mondial, il en va d’une paix solide ou précaire.

La pauvreté et la misère sont à l’origine de bien des drames, les frustrations créent de la tension. Ces évidences sont mises au jour par beaucoup de personnes, d’origines culturelles et idéologiques très différentes, mais le constat est le même.

Par ailleurs, toutes ces dernières années, nous avons respiré un air fortement pollué par l’individualisme, au point peut-être de penser que les relations sociales étaient superflues. Il peut même arriver que notre façon de vivre notre foi, nous qui respirons le même air vicié de l’individualisme, ait été également touchée. Pourquoi tenir à vivre en communauté paroissiale ? Pourquoi participer à telle ou telle activité dans la paroisse ? Pourquoi s’engager au service des autres ?

La vie de nos communautés paroissiales a souvent été réduite à la vie liturgique, selon les règles sanitaires. J’espère que cela nous a frustré !

J’espère que nous allons sortir de confinement pour rejoindre des fraternités autour de la Parole de Dieu ! J’espère que nous allons retrouver le goût de nous saluer !

Un défi est devant nous : soit parce que nous en avons pris l’habitude, nous “canonisons” le confinement qui muterait en individualisme encore plus violent, soit nous choisissons la fraternité comme un chemin de vie et “d’écologie intégrale”, c’est-à-dire un chemin qui choisirait le Royaume selon l’Évangile.

Alors, où est l’essentiel, où est le superflu ?

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