Envoyer, être envoyé.
Envoyer, être envoyé… ces mots résonnent, en cette rentrée, comme un appel à reprendre une année de travail, une année pastorale. Certes, nul ne peut oublier les derniers mois marqués par une crise sanitaire aux conséquences si lourdes, et la crainte de temps encore plus marqués par des crises sociales où de nouvelles violences se font sentir. Le pape François a probablement joint un jugement visionnaire à une parole prophétique, en faisant paraître il y a cinq ans l’encyclique Laudato Si’ : “Les problèmes actuels requièrent un regard qui tienne compte de tous les aspects de la crise mondiale” (LS 137). La situation au Liban, en Biélorussie, à Hong-Kong ou aux États-Unis, pour ne citer que ces quelques pays, ne manquera pas de retenir l’attention de toute la planète qui “gémit en travail d’enfantement” (Rm 8, 22). Avec persévérance, le pape continue de nous alerter sur “une vraie approche écologique”, une écologie qu’il souhaite “intégrale”, afin qu’elle “se transforme toujours en une approche sociale” (LS 49). En nous invitant plus particulièrement cette année à “écouter tant la clameur de la terre que la clameur des pauvres” (LS 49) il nous envoie pour prendre soin de notre planète et sauvegarder toujours mieux notre Maison commune. Ainsi, il nous rappelle avec conviction que “tout est lié dans le monde” (LS 16) : “Toutes les créatures sont liées, chacune doit être valorisée avec affection et admiration, et tous en tant qu’êtres, nous avons besoin les uns des autres.” (LS 42)
Mais pour être envoyé dans ce monde, nous avons en premier lieu besoin d’être des familiers de la Parole de Dieu : Benoît XVI nous le rappelait en son temps, “pour qu’elle soit comme une boussole qui indique la route à suivre”. L’Évangile n’est pas d’abord un contenu d’idées ou de vérités à sauvegarder ou à révéler : il est en nous comme un ferment, une action de l’Esprit pour expérimenter l’inouï de la vie que Dieu donne. L’Évangile nous déplace et nous envoie vers une nouvelle manière d’être, de vivre, d’agir, de décider. Nous sommes à l’heure de l’ultracrepidarianisme - pardonnez-moi ce mot étrange qui désigne l’expression systématique d’avis affirmés sur des sujets qu’on ne maîtrise pas - et il nous revient de ne pas sombrer dans des “disputes interminables de gens à l’intelligence corrompue, qui sont coupés de la vérité” (cf. 1 Tm 6,5). Notre société a besoin de dialogue, de raison, de recherche humble de la vérité. Nul ne peut prétendre établir la raison sur son seul jugement, nul ne doit agir isolément. L’heure n’est pas au repli mais bien à cet envoi vers d’autres que soi : “Tout est lié, et cela nous invite à mûrir une spiritualité de la solidarité globale qui jaillit du mystère de la Trinité.” (LS 240).
La prise en compte de cet enjeu exprimé par Laudato Si’ influencera nos actions des années à venir. Pour en effectuer le suivi, avec une équipe de fidèles et en lien avec les objectifs de la Conférence des évêques de France, il m’a semblé nécessaire de nommer un deuxième vicaire général, l’abbé François Campagnac.
Si, plus que jamais, nous vivons des temps d’incertitudes, l’Évangile demeure d’autant plus la parole de Vie. Dans son Exhortation Evangelii gaudium, le pape François avait écrit à tous les membres de l’Église en vue d’engager un processus de réforme missionnaire encore en cours. Avec l’encyclique Laudato Si’, il nous donne un bel outil pour que nous entrions “en dialogue avec tous au sujet de notre maison commune”.Pour que la Parole poursuive sa route, il faut que les communautés chrétiennes fassent un choix clairement missionnaire, “capable de transformer toute chose, afin que les habitudes, les styles, les horaires, le langage et toute structure ecclésiale deviennent un canal adéquat pour l’évangélisation du monde actuel, plus que pour l’auto-préservation” (EG 27).